point de vue du sentier la noyée sur la traversée de charlevoix

La Traversée de Charlevoix : le guide et le récit d’une sacrée aventure

Depuis qu’on habite à Québec, faire la Traversée de Charlevoix a toujours été un petit rêve. En fait, on n’avait jamais fait de longue randonnée et encore moins en autonomie… Bref, avant de voir plus grand et se lancer dans l’aventure du chemin de Compostelle, on va déjà faire la traversée complète de Charlevoix ! On aimait déjà beaucoup la région pour ses paysages à couper le souffle et son défi des 5 sommets, mais là, après cette longue rando, cet attachement ira au-delà de l’amour… Allez, trêve de compliments et on vous raconte notre périple sur la Traversée de Charlevoix !

départ de la traversée de Charlevoix

Qu’est-ce que la Traversée de Charlevoix ?

Avant de vous conter nos péripéties, on vous dresse un peu le tableau de cette rando. La Traversée de Charlevoix, c’est un raid :

  • de 105 km ;
  • en 6 ou 7 jours ;
  • avec un dénivelé cumulé de + 3336 m / – 3686 m ;
  • entre 15 et 20 kilomètres par jour ;
  • des litres d’eau bus ;
  • des belles rencontres ;
  • des dizaines d’animaux sur la route ;
  • des dizaines et dizaines de plantes, fleurs et végétaux en chemin ;
  • un dépassement de soi ;
  • une sensation de liberté et de vie hors du temps.
sur le sentier du jour 2 de la traversée de charlevoix

Nous avons fait la traversée complète de Charlevoix en chalet mais sachez que vous pouvez la faire aussi en camping, tout comme la demi-traversée, qui se fait en 3 ou 4 jours. Pour l’itinéraire, vous avez le choix entre la première moitié de la traversée qui va jusqu’au parc national des Hautes-Gorges-de-la-Rivière-Malbaie (entre les chalets La Chouette et le Geai Bleu) et la seconde moitié qui part de là jusqu’au Mont Grand-Fonds.

Il est également possible de faire le raid complet en 6 jours en combinant les deux premiers jours mais nous avons préféré le faire en 7 pour profiter pleinement de chaque portion du sentier et faire le sentier des Sommets.

Radio-Canada a consacré un article sur Eudore Fortin, le créateur de la Traversée de Charlevoix. On vous conseille cette lecture, c’est passionnant ! Merci Eudore d’avoir permis à des milliers de randonneurs de s’immerger été comme hiver dans cette belle région qu’est Charlevoix depuis plus de 40 ans.

Carte de la Traversée de Charlevoix

Pour que ce soit plus parlant, voici une petite carte globale de la longue traversée (télécharger la trace GPX) !

La Traversée de Charlevoix en hiver

Faire la traversée l’hiver ne nous a jamais effleuré l’esprit ; lire les expériences des skieurs l’hiver dernier a confirmé le fait qu’on passerait notre tour ! Déjà, cela s’adresse aux skieurs confirmés (pas comme nous). Parfois, vous devrez faire la trace et parfois, vous serez l’unique randonneur dans le chalet. On pense fort à la personne qui était seule le 31 décembre dernier. On a lu que certains étaient arrivés au chalet à la frontale à 23 h, que les conditions pouvaient être horribles… Attention, parfois tout se passe bien ! Mais il faut s’accrocher tout de même. Stéphanie vous conte ici sa Traversée de Charlevoix en hiver.

Matériel pour la Traversée de Charlevoix

Comme écrit précédemment, c’est notre baptême du feu comme longue randonnée et en autonomie. On a commencé à s’intéresser au matériel nécessaire quelques mois avant le départ pour ainsi acheter en rabais les choses les plus coûteuses comme les sacs de couchage. Cela nous a permis aussi de tester une grande variété de barres tendres et de boosters d’énergie ! C’est toujours bien de savoir ce qu’on est capable de supporter en quantité de sucres et de caféine au risque d’avoir un problème au beau milieu de nulle part. (Coucou l’intolérance à la caféine du jour au lendemain !)

Une autre chose à prendre en compte pour constituer votre équipement est le matériel fourni dans les chalets tout au long de la traversée. De notre côté, on n’avait pas prévu de cuisiner véritablement mais les ustensiles sur place peuvent vous servir. Inutile alors de vous encombrer, chaque gramme compte dans votre sac à dos ! On a écrit tout un article où nous vous détaillons la liste du matériel et de la nourriture pour une longue randonnée. Vous retrouverez alors tout ce qui a composé notre sac à dos pendant cette semaine à traversée la beauté charlevoisienne. En bref, de quoi vous équiper pour votre prochain périple !

le contenu du sac à dos de Xavier (matériel et nourriture) pour la traversée de Charlevoix
Le contenu du sac à dos de Xavier pour la traversée

Départ de la Traversée de Charlevoix

La réservation

Un beau jour, nous avons réservé nos billets sur un coup de tête. Non, je rigole ! Ce projet, nous l’avions en tête depuis un bout. On savait qu’on allait le faire cette année mais la date était incertaine du fait des nombreuses et récentes pluies qui ont mouillé/inondé le Québec… Le FEQ était fini et on avait une fenêtre de deux mois avant de repartir dans l’Ouest canadien en septembre. Comme nous étions larges niveau timing et comme il restait pas mal de places (étonnamment encore plus pendant les vacances de la construction !), on a pris notre temps pour bien sélectionner LE moment.

Chaque matin, notre réflexe était de vérifier la météo à La Malbaie pour les 7 jours qui suivent. Et puis, un jour, Madame Météo a annoncé une accalmie durable sur Charlevoix. On n’a pas réfléchi et on a réservé sur le site de la traversée. Sauf que, problème : le nombre indiqué de places disponibles ne correspondait pas à la réalité quand on avance dans la réservation. On était jeudi et on voulait partir le mardi suivant. 6 places étaient encore disponibles théoriquement, mais ce chiffre ne tient pas compte des autres possibilités (en 6 jours, les demi-traversées)… Bref, il n’y avait qu’une ou pas de place(s) disponible(s) dans certains chalets. En regardant les autres “vraies” disponibilités, on avait le choix entre lundi ou jeudi. Va pour lundi pour que le soleil soit de la partie ! Spoiler alert: heureusement que nous sommes partis en début de semaine !

le deuxième lac du jour 5 de la traversée de charlevoix

Les doutes avant de partir

OK, on part faire la Traversée de Charlevoix dans quatre jours et… on n’est pas prêts du tout ! C’est notre première longue rando en autonomie et niveau matériel, tout est bon comme on avait anticipé, mais ça s’arrête là. En fin de semaine, on a passé plusieurs heures chez MEC pour composer notre semaine de repas.

Et c’est avant de préparer nos sacs que les doutes ont envahi mes pensées. Est-ce que je suis capable ? Je n’avais aucun doute pour Xavier. Sommes-nous assez préparés ? Est-ce qu’on aura trop de choses à manger ? Pas assez ? Est-ce qu’il y aura plein de bibittes assoiffées prêtes à nous dévorer ? Le sac sera-t-il trop lourd à porter ? Sommes-nous fous de faire cette rando ?

Et puis, 2 soirs avant le grand départ et une fois les sacs bouclés, je me suis posée, j’ai fermé les yeux sans but aucun et la nature s’est imposée à moi. Les feuilles qui se balancent au bout des branches. Le vent qui amène toutes ces fragrances herbacées. Les paysages incroyables. Le fait d’être dehors longtemps. La sensation de liberté. Le fait d’être un témoin privilégié de la vie animale et végétale. Je n’avais plus le sentiment de devoir me dépasser, mais seulement l’envie de profiter de chaque instant. L’amour de la nature et du grand air a repris le dessus et j’ai gardé cela le plus longtemps possible jusqu’au départ.

bureau de la traversée de Charlevoix à Saint-Urbain

Le grand départ

Les sacs sont prêts, les plantes arrosées, les poubelles vidées et c’est l’heure de partir. On quitte Québec sous un ciel incertain et on se demande réellement ce qu’on est en train de faire ici… Encore plus quand la pluie se déchaîne sur le pare-brise de la voiture. Vous êtes sûrs qu’on ne peut pas faire demi-tour, là ? Allez, ça ira mieux à l’accueil. Ouf, le temps se calme tout comme nos craintes de commencer le premier jour trempés.

Au bureau de Saint-Urbain, les personnes sont adorables et prennent le temps (30 minutes environ) de nous expliquer chaque journée, les difficultés majeures, les points d’eau, les tronçons fermés, etc. Un grand merci à elles, on a besoin de ça avant de partir plus confiants !

Une fois à l’entrée de la ZEC des Martres, this is it ! Derniers réglages de sac, vérification du ciel (plus de réseau !), petite photo souvenir devant le panneau de départ au bout du parking et c’est parti ! Traversée de Charlevoix, here we go !

Jour 1 : ZEC des Martres – L’Écureuil + sentier des Sommets

12,6 km (télécharger la trace GPX)
+ 463 m / – 474 m
3 h 30 de marche (donc sans les pauses)

Arrivée au chalet

Les quatre km de piste qui mènent au chalet L’Écureuil se déroulent vite sous nos pieds. Nous longeons le joli Lac à l’Écluse avec quelques petits points de vue sur les monts de la rive opposée. Le terrain est plat, nos sacs sont bien positionnés et cela fait office d’échauffement.

Au parking peu avant le chalet, on s’arrête quelques minutes pour s’imprégner de la vue sur la vallée. On est dans un état d’esprit un peu second, l’euphorie se mêle à une interrogation existentielle sur les six prochains jours. Au même moment, une bourrasque fait s’envoler la tente des campeurs établis à côté du barrage et le fou rire de la campeuse est tellement communicatif qu’on oublie tout. Allez encore quelques mètres et on sera au chalet !

Ça y est, notre logement tout fait de bois est en vue et on sent qu’on va y être bien ! Au final, tous les chalets ont grosso modo les mêmes équipements et sont configurés à l’identique. En bas, un bel et grand espace cuisine/salon/salle à manger avec un poêle à bois et en haut, l’espace nuit avec une dizaine de matelas à disposer sur le plancher sous les toits. Dehors, il y a au moins une toilette sèche (parfois deux !) et un espace pour les campeurs plus loin. Chaque chalet est situé à proximité d’une source d’eau, que ce soit un lac ou une rivière. Bref, c’est simple et cosy, parfait pour se ressourcer !

chalet l'écureuil de la traversée de charlevoix

Le sentier des Sommets

On fait le tour, pose les sacs avant de partir directement sur le sentier des Sommets. Xavier avait eu un gros coup de cœur pour cette rando l’an dernier et c’est avec grand plaisir que nous la découvrons à deux cette fois-ci.

Une fois le ruisseau aux Mouches franchi, on se retrouve de l’autre côté du Lac à l’Écluse et c’est le moment qu’a choisi le soleil pour sortir la tête des gros nuages. Le sentier devient très étroit, juste la place pour qu’un randonneur puisse avancer. Mais quel sentier magnifique ! L’humidité de la région est telle qu’une végétation luxuriante se déploie. La mousse tendre recouvre chaque centimètre carré autour de nous et des fougères, du thé du Labrador, des fleurs et des arbustes se plantent çà et là en bordure. C’est tout simplement sublime.

On bifurque vers le premier sommet, le Mont de l’Écluse à 880 mètres d’altitude. Il faut gravir quelques rochers mais rien de bien compliqué. Une fois en haut, je lâche un “Wahou !”. La vue à 360 ° est juste à couper le souffle. L’impression est la même depuis le Sommet de la Grive et le Pic de l’Aigle, avec en plus les Lac Favre et Prime qui se dévoilent parmi les cimes des sapins. On pourrait rester des heures à contempler ce paysage fabuleux.

Première nuit de la Traversée de Charlevoix

C’est encore ébahi par ce panorama que nous redescendons au chalet. Les rayons solaires filtrent à travers les troncs bordant le Lac à l’Écluse et c’est dans cette atmosphère bucolique que nous rentrons au chalet.

Ne sachant pas vraiment combien de personnes se joindront à nous pour la semaine, nous sommes ravis de rencontrer Roxanne et son chien Moka, arrivés entre deux. Au moins, on sera déjà 3 à faire la traversée complète ! On rencontrera un peu plus tard dans la soirée trois campeurs qui feront eux aussi la longue traversée. Entre deux bavardages, on commence à prendre nos marques pour l’organisation de la fin de journée qu’on appliquera les autres fois. Aller chercher de l’eau, la faire bouillir, remplir les gourdes, installer son sac et ses affaires, manger, s’étirer (très important), préparer la nourriture du lendemain, faire sa vaisselle…

Le soleil se couche tranquillement et on décide de faire de même. Demain sera un autre jour et autant prendre des forces pour faire face à ce qui nous attend !

Jour 2 : L’Écureuil – La Marmotte

14,5 km (télécharger la trace GPX)
+ 337 m / – 727 m
4 h de marche

La randonnée

La nuit a été chaotique mais la fatigue est vite balayée par l’excitation de cette deuxième journée. Mine de rien, il a fait plutôt chaud dans le chalet et le fait d’être un peu emprisonné dans son sac de couchage n’a pas aidé à avoir une nuit récupératrice. Pas grave, on a encore cinq nuits pour y remédier. Comme la veille, on essaie de trouver une certaine routine pour se préparer : s’habiller, manger un bout, ranger le sac, faire le ménage du chalet…

départ du jour 2 de la traversée de charlevoix

Pour nous, la traversée commence réellement aujourd’hui, on voit la journée d’hier comme un échauffement ! Roxanne est partie devant avec Moka. On commence à marcher sous un ciel gris et quelques gouttes. Le sac ne pèse pas trop sur nos épaules et on finira par s’y habituer sauf pour grimper ! Le paysage est identique à celui d’hier : c’est une explosion de couleurs et de diversité dans cette forêt boréale. Fougères, épinettes noires, mousse, champignons, bouleaux, érables… Les décors se succèdent et une trouée nous offre une belle vue sur la vallée.

À un virage, Xavier m’annonce qu’il y a quelqu’un devant nous qui court. Pensant avoir rattrapé Roxanne et son husky, je monte d’un pas décidé sur les planches de bois constituant le sentier avant de rebrousser rapidement chemin. Orignal droit devant ! J’ai presque envie de donner mes lunettes à Xavier mais nous allons plutôt faire du bruit pour pouvoir passer sans dégâts. C’est la première fois qu’on en voit un en pleine nature et ça fait quelque chose d’en apercevoir un à 10 mètres de nous. Bref, c’est dans un concert de claquement de bâtons et de petits coups de sifflet qu’on franchit ce chemin de bois en gardant constamment un œil sur les profondeurs forestières.

point de vue sur la vallée du jour 2 de la traversée de charlevoix

On retourne en plein cœur du bois et entre les kilomètres 5 et 4 (les panneaux sont situés tous les 500 mètres et sont décroissants jusqu’à l’arrivée), on subit une attaque sauvage que l’on n’avait pas prévue. On ne comprend pas pourquoi des centaines de moustiques font leur apparition là, d’un coup, sans cours d’eau à proximité. Ils nous bouffent littéralement et marcher ne suffit pas à les dissuader. Soit. On sort le filet antimoustiques pour la tête et le cou (très pratique) et on s’asperge de lotion, mais ils sont voraces. Autant vous dire que nous ne traînons pas sur cette section !

Les derniers kilomètres sont éprouvants entre la chaleur, les piqûres et le sac qui commence à peser. Le terrain n’est pas idéal non plus : pas mal de grosses roches… Le parking des Morios est enfin en vue et nous retrouvons au chalet Roxanne et son fidèle compagnon déjà en train de filtrer de l’eau du ruisseau.

Le chalet La Marmotte

C’est une bonne entrée en matière dans la traversée et nous sommes contents de profiter de la proximité du Lac Boudreault et du cours d’eau qui s’y jette en contrebas de notre habitation du jour. Préférez vous baigner dans le ruisseau à cause des sangsues du lac ! L’eau nous rafraîchit délicieusement les jambes et on savoure ce repos bien mérité sous le soleil. On en apprend davantage sur notre co-randonneuse gaspésienne et son parcours est inspirant. C’est aussi ce qu’on est venus chercher en faisant la Traversée de Charlevoix : des rencontres avec des personnes partageant cet amour de la nature et du plein air.

chalet la marmotte de la traversée de charlevoix

Jour 3 : La Marmotte – La Chouette

16,9 km (télécharger la trace GPX)
+ 806 m / – 580 m
4 h 20 de marche

Nos corps commencent à s’habituer à la literie nomade et c’est un peu plus reposés que nous émergeons peu après le lever du jour. Nous avons été rejoints au cours de la soirée par un duo, Camille et Pascale de Gatineau et de Montréal, parties elles aussi un peu à l’arrache en réservant quatre jours avant le départ. On fait rapidement connaissance avant de boucler les sacs à dos pour affronter cette journée difficile.

Le sentier La Noyée est un challenge à lui tout seul. Je me souviens de son parcours lors de l’édition 2021 du défi des 5 sommets et ce n’était pas de la tarte à cause du dénivelé et du terrain instable. On avait d’ailleurs croisé en haut un jeune couple en pleine Traversée de Charlevoix et leurs visages crispés par l’effort et la chaleur flottent encore dans mes souvenirs. Bref, à l’époque, je n’imaginais clairement pas qu’on serait à leur place un jour !

Le sentier La Noyée

Roxanne et Moka se joignent à nous et après un dernier regard au Lac Boudreault à la réflexion parfaite, nous commençons cette longue journée. L’idée de prendre le chemin alternatif pour éviter La Noyée m’effleure l’esprit une seconde. Mais non, je ne peux et ne veux pas me défiler. Les premiers kilomètres s’enchaînent entre les sections caillouteuses et les sections dans la forêt. L’effort est intense et pousser sur les jambes devient de plus en plus difficile. Même les bleuets tout au long du parcours n’arrivent pas à me donner de la force. Je n’ai pas envie d’abandonner mais je voudrais m’arrêter tous les 50 mètres…

Après une ultime pause au dernier point de vue, on repart et dans un regain d’énergie, je suis Xavier dans les gros rochers jusqu’au sommet de La Noyée. Là, on s’écroulerait presque de bonheur d’avoir rejoint le point culminant de la journée. Pour reprendre des forces, on ne restera pas moins de 40 minutes en haut à manger face à une vue bien dégagée sous un soleil radieux. Nous retrouvons Roxanne et Moka en pleine discussion avec Bonnie, une Canadienne en pleine (très) longue randonnée sur le sentier transcanadien qui intègre une grande partie de la Traversée de Charlevoix.

L’arrivée au chalet

OK, le plus dur est fait et nos jambes désormais plus légères nous emmènent vers la prochaine destination, le chalet La Chouette. Nous marchons cette fois-ci avec Roxanne et Moka à découvert avec de jolis points de vue sur les environs avant de replonger dans l’ombre des arbres.

L’arrivée au chalet est salvatrice, la vue est bien agréable sur le lac. À notre arrivée, un héron s’envole avec grâce sur la rive opposée. Tout est paisible.

Jour 4 : La Chouette – Le Geai Bleu

Retour dans la ZEC des Martres et entrée dans le parc des Hautes-Gorges
19 km (télécharger la trace GPX)
+ 569 m / – 895 m
5 h de marche

La rando

Quatrième jour de la longue Traversée de Charlevoix et notre routine matinale est bien rodée désormais. On perd moins de temps qu’au début et nous sommes prêts à avaler les kilomètres dès 8 h 20. Le ciel est bien couvert et cela ne nous étonnerait pas s’il venait à se déchaîner sur nos têtes… Bingo, les premières gouttes tombent peu après notre départ.

départ du jour 4 de la traversée de charlevoix

On évolue dans un décor tout droit sorti de l’imaginaire de Tolkien. D’ailleurs, cette grotte ne renfermerait-elle pas Gollum ? Les sacs à dos se sont allégés et la montée de la boucle du Bihoreau ne me paraît pas si difficile. Le sentier débouche sur un autre chemin parsemé de grosses pierres qui grimpe pas mal avant de retourner sous le couvert des arbres. Nous arrivons sur le flanc de la montagne et un point de vue nous donne un bon prétexte pour reprendre de l’énergie (en barre).

Cette journée se caractérise par une belle descente et nous y voilà. Seulement, la pluie s’est intensifiée si bien qu’on est obligés d’enfiler nos K-ways et d’envelopper les sacs dans leur rain cover. La pente est bien raide et on manque de glisser plusieurs fois sur les rochers humides. Au loin, un parapluie noir se balance, protégeant un large carré jaune. On finit par le rattraper pour faire la connaissance de sa propriétaire, Naomie, une campeuse de Québec qui fait aussi la traversée complète. Elle a tout notre respect pour porter son matériel de rando et de camping sur le dos toute seule !

Une fois cette section bien demandeuse en attention derrière nous, le sentier repart en forêt et on va vite faire la connaissance de la tant redoutée bouette ! La boue, on aime ça mais par petites touches seulement. Ici, difficile de l’éviter et on sort de là les pieds mouillés. Je déclare la journée de la bouette ouverte ! On glisse, on se rattrape, on se fait peur, on se salit… Rien de bien grave, on fera tout sécher autour d’un bon feu ce soir ! Notre récompense est la belle vue (presque) dégagée sur le célèbre sentier L’Acropole-des-Draveurs !

La dernière section passe par le sentier de vélo étant donné qu’un castor a joué au barrage sur le chemin pédestre. On pourrait être ravis de marcher sur une piste plate et gravillonneuse pendant 5 km mais croyez-nous, ce sont les plus pénibles de la journée et ce, même si la pluie a cessé ! Les pieds commencent à être douloureux et on a hâte d’arriver enfin au chalet.

la vue sur l'acropole-des-draveurs dans le parc des hautes gorges
Vue sur L’Acropole-des-Draveurs

Le Geai Bleu, plus beau chalet selon nous de la Traversée de Charlevoix

Nous ouvrons la porte et restons bouche bée. Le chalet est très lumineux et la vue sur la rivière Malbaie est simplement incroyable. Le canapé et la grande table sont d’ailleurs situés devant les grandes fenêtres donnant sur le balcon qui se prête parfaitement pour une contemplation sans fin.

Roxanne prend les choses en main pour nous faire un bon feu et apprend les rudiments au padawan Xavier. Quelques minutes après, la température de la pièce grimpe et l’onde de chaleur pénètre nos corps un peu meurtris. Un feu, une vue, rien de plus. On reprend toutefois les habitudes en descendant le long de la falaise pour remplir les récipients d’eau et rincer les jambes ou se baigner dans l’eau glacée (je n’ai pas eu le même courage que Camille et Roxanne !).

le chalet le geai bleu de la traversée de charlevoix

Au retour, nous croisons le chemin de Guillaume, qui vient de faire 50 km… à pied ! Il est parti à 6 h 30 ce matin du parking de la ZEC des Martres pour arriver au Geai Bleu à 18 h 30. Bref, il a fait la demi-traversée en une journée et en partie sous la pluie. Ça, c’est du challenge personnel ! Il n’est clairement pas un randonneur du dimanche mais ses pieds ont bien souffert de cette folle aventure.

Un peu plus tard, on apprendra que le groupe des trois campeurs arrêtera la traversée demain matin à cause de la pluie et des blessures. Pour terminer cette journée pas si facile, on se délecte ensemble de certains récits écrits dans le carnet du chalet avec un bon bol de bleuets en guise de dessert et le son de la rivière en bruit de fond.

Allez, une bonne moitié de la Traversée de Charlevoix de faite !

vue sur la rivière Malbaie depuis le balcon du chalet le geai bleu de Charlevoix

Jour 5 : Le Geai Bleu – Le Coyote

Entrée dans la ZEC du Lac-au-Sable
15,4 km (télécharger la trace GPX)
+ 604 m / – 243 m
4 h 30 de marche

Bien que le temps soit aussi maussade que la veille, notre bonne humeur n’est pas entachée. Ce matin, la vue nous hypnotise toujours autant et les nuages s’échappent lentement des sapins pour prendre de l’altitude.

Nous sommes de plus en plus organisés et partons peu après 8 h pour cette étape qui ne devrait pas trop mal se passer. Moka est lancé comme une fusée et entraîne sa maîtresse loin devant. Le sentier longe la rivière Malbaie et nous fait traverser un bassin de végétation brillante de pluie. On ne voit pas trop où l’on met les pieds mais tant qu’on suit les balises, tout va bien. La montée est douce et cela nous convient bien.

départ du jour 5 de la longue traversée de charlevoix

Le chemin s’oriente ensuite dans la forêt avec le clapotis du ruisseau Chouinard en résonance dans le couloir végétal qui grimpe petit à petit. Une bruine vient se mêler au flot du cours d’eau. L’ambiance est presque mystique à cause de la légère brume qui voile notre horizon. Nous avons l’impression d’être dans un monde à part, seuls avec cette nature si puissante. C’est une sensation difficile à décrire mais nos conversations se sont tues pour entrer en symbiose avec cet environnement enivrant.

Une trouée nous donne l’occasion de sortir de ce cocon tropical. Ici la mousse s’agglutine au pied des sapins, on pourrait les effleurer tant elle ressemble à des boules de coton ! Le plafond gris est toujours aussi bas mais la pluie a cessé. Pas de point de vue pour l’instant !

Nous poursuivons dans un décor enchanté avant de longer un joli lac, le Lac Misère, où les castors ont érigé un barrage naturel. Et là, au fur et à mesure de notre avancée sur le rivage bordé de sapins, le silence s’impose. Depuis ce matin, on n’entendait que l’écoulement de la rivière puis du ruisseau. Il règne désormais un calme olympien autour de l’étendue d’eau et nous sentons que nous devons nous arrêter quelques instants.

On repart en forêt, dans la boue, terrain privilégié des minuscules grenouilles qui se dépêchent de fuir à notre passage. Là, le paysage change radicalement : il oscille entre le vivant avec la mousse d’un vert fluo et la mort avec les troncs aux branches décharnées où s’entortillent des mètres de lichen. Mais cet entre-deux mondes s’évanouit rapidement puisqu’un deuxième lac apparaît au loin. Ici, point de barrage érigé par Maître Castor mais des dizaines de nénuphars en fleur. De l’autre côté du rivage, les nuages nous cachent le Mont Élie mais dévoilent un carré bleu juste au-dessus de nos têtes.

Au final, nous finirons les derniers kilomètres sur une piste à travers la forêt et un peu couverts de boue. Aujourd’hui, c’était la journée de la bouette + ! On a tous pensé que ce serait difficile comme cela a été annoncé, mais au fond, la montée est vraiment progressive et douce et les kilomètres passent assez vite. Une fois au chalet, Xavier se propose d’être le maître du feu ce soir mais le bois est pas mal humide. Ce n’est pas une belle flambée mais cela suffira à faire sécher toutes les affaires !

le chalet le coyote de la traversée de charlevoix

Jour 6 : Le Coyote – L’Épervier

19.3 km (télécharger la trace GPX)
+ 485 m / – 616 m
5 h 15 de marche

Cette portion de la traversée est censée être plutôt facile. Croyez-nous, cette journée est la deuxième plus difficile du raid ! Le récit de ce maudit jour est un peu plus court que les autres, vous comprendrez assez vite pourquoi.

On commence la randonnée sous un ciel morose. Ça deviendrait une habitude ?! Naomie, Roxanne (et Moka) partent les premières et on ne les croisera plus avant la fin. La forêt boréale nous ouvre à nouveau ses portes et la mousse est omniprésente. On s’arrête à un premier point de vue et c’est le moment où une première pluie s’abat sur nous. Bon, on ressort les couches imperméables sèches et on continue de marcher. Le sentier passe par plusieurs pistes de VTT mais on ne croise pas âme qui vive. De retour dans la forêt, nous avons la jolie surprise de voir un faucon perché sur la cime d’un sapin. Son cri aigu résonne plusieurs dizaines de mètre à la ronde ! Peu après, on entend le cri d’un orignal au loin. Par précaution, on fait un peu plus de bruit. Puis, c’est une belle grenouille qui croise notre route.

départ du jour 6 de la traversée complète de Charlevoix
On sait que la photo est floue mais Moka était pressé de partir sur la trace d’un animal !

La Traversée de Charlevoix sous une pluie battante

Notre joie de voir ces animaux est brusquement interrompue par des trombes d’eau. Une bonne drache comme on dit dans le nord de la France. Il reste 5 km à faire et nous sommes trempés. Le sol n’a pas le temps d’absorber cette quantité d’eau et le chemin déjà boueux ressemble à une mare brunâtre. On espère que cela va se calmer mais la pluie redouble d’intensité. On a le moral dans les chaussettes (mouillées). Nous ne verrons plus rien du paysage hormis une belle clairière (où passent les lignes électriques) que nous avons traversée au pas de course sous cette pluie d’orage.

Un panneau annonce 2 km restants, hourra ! Mais c’est une fausse joie car le panneau officiel est situé presque 1 km plus loin. Bon, on n’est plus à 1 km près quand on est trempés de la tête aux pieds, si ? L’orage gronde au loin mais il ne se rapprochera jamais vraiment de notre position.

La fin de cette journée super bouette est éprouvante, on en a marre alors que le terrain n’est pas mal du tout. Il y a même des bleuets à proximité du chalet mais même la gastronomie sauvage ne nous réjouit pas. Par miracle, nous finissons par arriver au chalet, trempés comme jamais.

Le chalet L’Épervier

Naomie et Roxanne sont arrivées peu avant nous et sont dans le même état. Moka semble assez indifférent au temps, il est couché sur le plancher et se repose. Quelle vie de chien ! Nous nous changeons intégralement et Roxanne fait partir une belle flambée. Pascale et Camille arriveront un peu plus tard entre deux averses.

Cette dernière soirée a un goût spécial. Dernier repas, dernières conversations… On apprendra entre autres la base d’une bonne trousse de secours grâce à Roxanne et Naomie. Autant dire que la nôtre a des lacunes que nous comblerons la prochaine fois !

chalet l'épervier de la traversée de charlevoix

Jour 7 : L’Épervier – Le Mont Grand-Fonds

10,3 km (télécharger la trace GPX)
+ 275 m / – 342 m
2 h 40 de marche

Dernier réveil au grand air, dernier roulage de sac de couchage, dernier rangement du sac à dos, dernier déjeuner pris ensemble, dernière vaisselle, dernier ménage, dernier chalet… Ce dernier jour de la Traversée de Charlevoix commence dans une douce atmosphère quoique déjà un peu nostalgique. Une petite photo souvenir tous ensemble pour garder une trace de cette belle gang. Une fois n’est pas coutume, nous commençons cette ultime étape à cinq (six avec Moka).

départ du jour 7 de la traversée complète
La belle gang de randonneurs ♥️

Le jour 7 de la traversée complète est le plus “facile” de cette longue randonnée. La majeure partie se passe en forêt. Sur cette portion, point trop de mousse moelleuse ou de végétation à foison, c’est une forêt ! La partie un peu plus ardue se situe sur les trois premiers kilomètres mais rien de bien méchant après tout ce qu’on a grimpé depuis le jour 1 ! C’est le seul jour de la traversée où la signalisation est orange et blanche sur les arbres.

Par chance, le ciel est assez dégagé et nous sommes confiants pour avoir une journée sans pluie. On a assez donné niveau précipitations ces dernières 72 h ! Par miracle, on s’en tire seulement avec un peu de bouette au début et à la fin de la rando. Youhou ! On ne finit pas avec les pieds trempés !

Au fil des kilomètres qui se déroulent sous nos pieds, j’ai réellement du mal à assimiler que c’est la fin. Ce jour est un peu plus silencieux que d’habitude, on s’imprègne encore plus de ce qui nous entoure. Les derniers points de vue nous comblent et cette dernière portion nous donne l’occasion de voir un ultime animal, un porc-épic (le premier de la semaine pour nous) en train de grimper dans un arbre. Merci Roxanne à l’œil aiguisé et à Moka au flair exemplaire ! Nous distinguons des traces fraîches d’orignaux mais ils se seront sans doute éloignés au cœur de la forêt.

Malheureusement, nous avons perdu en route notre duo de choc Pascale et Camille… Après les avoir attendues un moment, nous finissons les deux derniers kilomètres sur un chemin forestier. On revient malgré nous à la vie civile en croisant des promeneurs, puis des voitures. Une fois arrivés sur l’asphalte, le parking d’été fait son apparition, tout comme le panneau d’arrivée de la Traversée de Charlevoix. Ça y est, c’est fini et tout se bouscule dans ma tête…

Le retour et l’après Traversée de Charlevoix

Le retour

Une fois nos compagnons de route congratulés, laissés et déposés, nous ne réalisons pas encore que l’on vient de finir la longue traversée tous ensemble… Il nous faut encore du temps pour nous remettre doucement de cette belle aventure. Revenir à la circulation, à la civilisation, au réseau, aux écrans, au quotidien qui ne sera pas tout à fait le même après cette épopée.

fin de la traversée de charlevoix après 105 km !

L’après : si c’était à refaire ?

La Traversée de Charlevoix, c’est se déconnecter pour se reconnecter. Se reconnecter à soi, aux autres, à la nature. On s’adapte à elle pour une fois. Se lever et se coucher en même temps que le soleil, faire face aux changements météorologiques soudains, aller chercher l’eau par soi-même… Se concentrer sur l’essentiel.

Nos appréhensions se sont vite envolées dès le début de la traversée et l’immersion totale dans Charlevoix nous a fait le plus grand bien. Les 7 jours ont bien duré 7 jours, le temps est passé comme il devrait toujours passer. Qu’importe de savoir quel jour de la semaine on était, profiter de l’instant présent n’a jamais eu autant d’importance.

Donc oui, on la referait sans hésiter et on ne peut que vous la conseiller. Niveau difficulté, c’est sûr que si vous ne marchez pas du tout, cela peut être un défi en soi. Autrement, il n’y a aucune raison que vous n’y arrivez pas. Si on peut faire la Traversée de Charlevoix, vous pouvez la faire aussi !

Merci à Roxanne et Moka, Naomie, Camille et Pascale d’avoir partagé cette semaine intense et si riche humainement à nos côtés.

au point de vue de la noyée sur la traversée de charlevoix

Conseils en tout genre pour bien faire la Traversée de Charlevoix

  • Les jours les plus difficiles de la traversée complète selon nous sont les jours 3 et 6. Si le deuxième jour commence à être difficile, faites l’impasse sur le sentier La Noyée le troisième jour. De cette façon, vous garderez des forces pour la suite.
  • On vous conseille de faire la traversée sur 7 jours. Ainsi, vous pourrez faire le magnifique Sentier des Sommets le premier jour.
  • Prévoyez au moins une bouteille/gourde d’1,5 l par jour, vous boirez beaucoup !
  • N’oubliez pas votre système de filtration de l’eau. Sur les 6 nuits, seule une source d’eau était vraiment claire (bon, il faut la filtrer aussi).
  • Ne sous-estimez pas les bibittes. Quelques portions de la traversée ont leur lot de moustiques et après plusieurs dizaines de piqûres au total, je recommande le port du pantalon !
  • Prenez des bâtons de randonnée avec vous, ils vous sauveront de plus d’une chute et soulageront vos genoux lors des descentes.
  • Ne soyez pas surpris par les souris la nuit, elles aiment courir le long des murs du chalet. Bouchons d’oreille vivement recommandés !
  • Emportez un stylo, vous pourrez conter votre journée dans le carnet prévu à cet effet dans chaque chalet. (Et passer une partie de la soirée à lire les péripéties de vos prédécesseurs)
  • Ouvrez vos yeux et vos oreilles.
  • Inspirez profondément.
  • Profitez, juste profitez de chaque moment dans cette si belle nature québécoise.

Alors, c’est quand votre tour ? 🥾😉

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